Et oui, la population humaine est en train
de suivre une évolution qu’on attribuerait volontiers à celle d’une espèce de
criquet qui dévore tout sur son passage avant de tous mourir faute de
ressources. Évidemment, l’échelle de temps est un peu plus grande de notre côté
mais il n’empêche qu’on se doute tous que la planète ne peut supporter qu’un
nombre fini d’humains. Ce nombre, selon les spécialistes, peut varier de 4
milliards (on serait déjà en surpopulation) à une centaine de milliards pour
une planète exploitée de façon optimale.
Dans un article précédent, j’exposais ma
certitude que l’espace était notre nouvelle frontière et que c’est seulement en
l'atteignant que nous pourrions assurer un avenir à l’humanité. Mais soyons
honnêtes, même si nous étions en mesure de nous installer ailleurs, on ne
transporterait sans doute pas des milliards de personnes jusqu’à cette nouvelle
destination. La surpopulation va frapper notre petite planète tôt ou tard,
c’est une certitude.
Le problème qui nous intéresse ici, outre
ceux de place, d’accès à l’eau ou de tensions internationales, c’est celui de
la mangeaille. Sachant que nous mangeons de plus en plus (3600 kcal/hab/jour
pour les pays industrialisés alors que l’on peut se satisfaire de 2800) et que
nous cuisinons de moins en moins, une foultitude de techniques ont été
inventées pour fabriquer de la nourriture moins chère et en plus grande
quantité. Depuis le bœuf cloné américain jusqu’à l’huile de palme indonésienne,
en passant par les engrais, pesticides et autres OGM, l’industrie
agro-alimentaire, contrairement à ce que l’on pourrait penser, est très
consommatrice de “nouvelles” technologies.
Mais chacune de ces avancés nous éloignent
de ce que nous considérons comme de la nourriture “idéale” qui serait produit
dans des fermes bucoliques où les moutons et les choux seraient heureux.
Passons sur la débilité de cette image
mentale, voilà où l’équation se complique vraiment : et si il était nécessaire
de produire intensivement de la nourriture pour faire manger tout le monde ? Les
premiers engrais chimiques de 1800 et la mécanisation des travaux agricoles ont
probablement sauvé l’Europe de la famine. Et si nous vivons aujourd’hui jusqu’à
80 ans, c’est aussi en grande partie parce que nous mangeons beaucoup plus
sainement, que nos aliments ne sont pas infestés de bestioles et de maladies.
En clair, nous vivons mieux parce que nous arrosons nos plantes de pesticides.
Parlons maintenant des OGMs : je suis
plutôt quelqu’un de prudent et je hais la façon dont certaines sociétés qui
vendent des semences modifiées travaillent, mais où sont les preuves que
celles-ci sont dangereuses pour la santé ? Faut arrêter l’obscurantisme ! Avoir
peur de quelque chose parce que c’est nouveau, c’est de la bêtise caractérisée
(exactement le même débat que ce que j’entends ces temps-ci sur les
nanotechnologies). Si la recherche se poursuit et que l’on aboutit à ce qu’on
nous promet (des plantes demandant peu d’eau pour la sécheresse en Afrique, ou
immunisée à certaines maladies, etc...), pourquoi se priver de ces avancés ?
J’espère que vous l’aurez compris, je me
fais ici l’avocat du diable, je ne suis pas un ardent défenseur de
nourriture mal produite. Cependant je ne peux m’empêcher de penser qu’il est
impossible de nourrir 8 milliards d’êtres humains au bio (désolé Mélanie !),
simplement parce que cela voudrait dire cultiver chaque parcelle de terre
utilisable (et donc réduire l’écosystème sauvage, bonne prise de tête messieurs
les écolos !), remettre tout le monde dans les champs et se préparer à des
épidémies de choléra.
D’un autre côté, des progrès ont été faits
: l’industrie agro-alimentaire française et européenne (ce qui signifie une
minuscule part de la bouffe produite dans le monde) a effectué un virage pour
le mieux. De très nombreux pesticides dangereux ont été interdits, les doses de
produits chimiques réduites drastiquement et tout cela sans baisse de rendements.
L’agriculture raisonnée fait son petit bonhomme de chemin dans les mentalités.
La crise alimentaire (flambée des prix et
famine dans certaines régions du globe) commence lentement à pointer le bout de
son nez. Elle est en plus très largement aggravée par la mise en place d’un
marché d’obligations sur les récoltes et par le dérèglement climatique.
Quelques réponses à ce problème :
- Changeons nos habitudes alimentaires :
nous surconsommons certains aliments qui coûtent très chers à produire. Un
exemple ? La viande, avec le bœuf et le porc en tête en termes de
consommation dans les pays industrialisés. Il faut 8kg de céréales pour
produire 1kg de viande bovine, 5 pour 1kg de porc et seulement 1 pour 1 kg de
volailles. Sans compter que les élevages bovins sont parmi les plus grands
producteurs de gaz à effet de serre (le méthane) ! Il serait peut être
temps de se raisonner un peu…
- Arrêtons de spécialiser des pays entiers
dans une seule production : cacao en côte d’ivoire, huile de palme en
Indonésie, les biocarburants dans les pays d’Amérique du sud et j’en passe… Une
population devrait tout d’abord être en mesure de se nourrir soi-même. Et cela
n’a aucun sens de faire voyager de la nourriture sur des milliers de km dans
des soutes de cargo pour gagner quelques centimes par tonnes.
- Laissons leur chance aux nouvelles
technologies agro-alimentaires. Tout ce que nous mangeons est issu d’un
processus de croisement ou d’hybridation, et n’est en aucun cas naturel. Autant
se faire une raison et essayer d’éviter de mélanger ce qui est issu d’une peur
panique des technologies modernes (même genre de peur que celle du nucléaire)
et ce qui est réellement mauvais pour nous.
- En finir avec la bourse qui met ses gros
doigts dans le marché de la nourriture mondiale. Assurez la valeur financières
de ses récoltes à venir est plutôt une bonne idée pour les paysans, mais il est
complètement fou de jouer ce montant sur les places financières. C’est à un
organisme international de réguler les prix des matières premières alimentaires
si il y a une famine quelque part, pas aux traders de Wall Street.
Etonnamment, et pour finir sur une note
encore plus grave, la crise alimentaire sera probablement l’aspect le moins
épineux de la surpopulation mondiale, loin derrière l’accès à l’eau, la
pollution et les tensions issues des disparités sociales.
Je vous laisse sur ces bonnes paroles et
je vais manger mon quinoa-poulet du soir. Bon appétit !